La motivation chez les tout-petits

Votre tout-petit semble se décourager facilement devant une tâche ou un défi ? Vous vous demandez comment maximiser la motivation et accompagner votre enfant de la manière la plus bienveillante possible ? Joanie Guilbert, psychoéducatrice au Centre DÉFI répond à nos questions concernant la motivation chez l’enfant.

Pouvez-vous vous présenter ?

J’ai fait mon bac et ma maîtrise en psychoéducation à l’UQAT. À travers mon parcours, mon expérience de stage et projet de maîtrise étaient orientés vers l’enfance, clientèle qui m’a toujours beaucoup interpellée. Je fais maintenant partie de l’équipe du Centre DÉFI depuis 3ans.


Mon travail consiste à évaluer le besoin pour comprendre les comportements du jeune, établir un plan d’intervention, mettre des moyens d’intervention en place et soutenir les parents. Un éventail de tâches fait également partie de mon quotidien, tel que monter et donner de la formation.

Comment pourrait-on définir le concept de motivation, en particulier chez l’enfant ? Comment ça s’inscrit dans son développement ?

La motivation se définit comme l’engagement, la participation et la persistance de l’enfant dans une tâche. L’anticipation du plaisir et l’utilité d’une activité sont des moteurs de la motivation. En d’autres terme, si l’enfant ne perçoit pas à quoi lui sert une tâche X et qu’il n’éprouve pas de plaisir à la faire, il est fort probable que la motivation ne soit pas présente.


Un autre facteur pouvant influencer la motivation de l’enfant est sa perception de ne pas avoir les capacités pour réussir. Il aura donc moins de motivation à se mettre en action s’il juge qu’il n’est pas capable d’accomplir la tâche ou l’activité, car c’est confrontant pour son estime de lui. On peut alors observer que l’enfant cherche à éviter l’activité proposée par divers moyens.

À partir de quel âge, peut-on dire qu’un enfant exerce sa motivation ?
L’enfant peut exercer sa motivation dès son jeune âge. Par exemple, on pourra observer des signes de motivations chez  un enfant qui apprend à ramper (environ 7 mois) et à qui l’on place un jouet convoité hors de portée. Dans cet exemple, si l’enfant n’a pas tout-à-fait la capacité motrice pour avancer, il n’aura pas de plaisir, peut se fâcher ou se décourager et jouer avec d’autres jouets qui se trouvent à côté de lui. À l’inverse, s’il ne manque qu’un petit “coup de pouce” pour s’élancer et se sent capable d’y aller, et bien il s’agit de motivation.

Est-ce que le fait de challenger son enfant, le pousser à affronter certains défis, aide à développer sa motivation ou au contraire, cela peut avoir des effets négatifs ?
Challenger son enfant peut s’avérer positif si c’est bien dosé, en respectant les capacités de l’enfant et fait de façon bienveillante. Si, à travers ces challenges, l’enfant vit plusieurs échecs consécutifs, cela peut avoir l’effet inverse. C’est pourquoi, il faut porter une attention aux signes verbaux et non-verbaux de l’enfant et ajuster ses attentes. Il est possible que le défi posé soit beaucoup trop grand tout simplement.

La motivation chez l’enfant, c’est inné (ça fait partie de sa personnalité) ou ça s’apprend ?
En fait, il est possible de dire que la motivation est innée et acquise.
Elle peut être innée dans le sens où, si l’enfant naît avec des limitations physiques ou neurologiques, cela peut jouer sur sa perception d’avoir les capacités pour y arriver. De plus, quand quelque chose est difficile, il est possible qu’il n’ait pas de plaisir à l’accomplir et, par le fait même, moins de motivation. Le niveau de curiosité intellectuelle et l’autonomie de l’enfant sont des facteurs qui lui appartiennent et qui peuvent certainement influencer son désir de se mettre en action.


La motivation peut aussi être acquise, c’est-à-dire s’apprendre via des facteurs environnementaux et les expériences vécues. Par exemple, certaines attitudes parentales peuvent réduire la motivation chez leur enfant telles que la surprotection, surévaluer ou sous-évaluer ses capacités, dévaloriser ou démontrer soi-même peu de motivation dans les activités réalisées. Il ne faut pas oublier que l’enfant apprend par observation de ses modèles, c’est-à-dire ses parents. Dans le même ordre d’idées, si les adultes significatifs de l’enfant valorisent l’activité, mettent en lumière les forces et capacités de l’enfant, cela aura pour effet de le motiver. Il est toutefois important de bien doser l’évaluation des capacités de l’enfant, puisque si l’adulte le surévalue par exemple, il comprendra vite qu’il n’a finalement pas le potentiel attendu et peut se démotiver.
Aussi dans l’environnement, les pairs signifient une source d’influence de la motivation. À partir d’environ 7 ans, l’enfant se compare à ses pairs. Il fait alors une évaluation de ses capacités dans l’activité donnée et s’il juge qu’il n’a pas les prérequis, on pourra observer une démotivation.

Quel est votre avis professionnel par rapport aux tableaux de motivation ou par rapport au fait d’offrir des récompenses à la suite d’un accomplissement ?
En ce qui concerne les tableaux d’émulation/récompenses, ils peuvent être intéressants à utiliser. Il faut toutefois considérer quelques éléments si vous souhaitez l’utiliser:


  • S’assurer de fixer un seul objectif clair et opérationnel (Ex :attention de ne pas mettre un objectif trop large et flou tel que: « sois gentil, écouter les consignes). En déterminant un objectif clair, l’enfant saura à quoi s’en tenir et ce sera plus efficace.
  • Ce type de motivateur sera davantage utilisé pour modifier/remplacer un comportement indésirable pour un comportement souhaité. Donc, attention de ne pas l’utiliser à toutes les sauces.
  • Tout dépendant de ce que vous souhaitez travailler, motiver l’enfant à quoi? Dans quelle activité? Questionnez-vous d’abord sur le pourquoi ça ne le motive pas: capacités? Objectifs à ajuster? Les attentes de l’entourage? L’attitude défaitiste de l’entourage concernant l’activité? Des expériences passées similaires qui n’ont pas été concluantes? Ne perçoit pas à quoi ça sert, ETC. En étant à l’écoute de l’enfant et en observant la raison de sa démotivation, les interventions à apporter seront plus adaptées. Il se peut que le tableau de motivation ne soit pas du tout le moyen à mettre en place.
  • Beaucoup de gens vont les utiliser comme une motivation extrinsèque (venant de l’extérieur), en récompensant avec un “nanane” quand l’enfant réussit. Cela peut créer un précédent dans plusieurs aspects du quotidien et moins de chance de maintien des acquis.


Attention! Une motivation intrinsèque (souligner les réussites, féliciter l’enfant) est plus puissante pour l’enfant.
Pour bien comprendre voici la différence entre les 2 types de motivateurs pour travailler la propreté chez l’enfant par exemple :
1) Donner un bonbon ou une gommette quand l’enfant réussit à aller sur le pot (motivateur extrinsèque);
2)C’est la “fête au village”, on démontre à l’enfant qu’on est fier de lui par l’intonation de la voix, on le félicite, on peut même danser avec lui. On peut “beurrer épais” (motivation intrinsèque, vu qu’on nourrit son sentiment de compétence et son estime de lui).

Auriez-vous des trucs ou des outils afin d’accompagner son enfant à développer sa motivation de manière bienveillante ?
Voici quelques pistes pour permettre à l’enfant de développer sa motivation au quotidien:

  • Fixer des objectifs réalistes et atteignables selon son âge et ses capacités. On veut lui faire vivre des réussites. C’est bon pour développer son estime de lui;
  • Rendre l’activité agréable, variée et stimulante;
  • L’aider au besoin, en laissant l’enfant le faire seul le plus possible. En d’autres termes, soyez un support discrètement actif;
  • Récompenser (verbalement, en complimentant c’est très puissant!), sans tomber dans l’excès, afin qu’il se sente reconnu et valorisé. Si l’on cultive son estime de soi, la motivation en sera grandement influencée!
  • Utiliser les réussites passées pour lui faire voir ses capacités quand il se décourage face à une situation.

Il s’agit d’une équipe multidisciplinaire pour enfants, où le travail d’équipe est très riche afin de répondre au maximum aux besoins des familles. Le Centre Défi ce sont donc des professionnels de la santé et de l’éducation dans un endroit unique pour favoriser le développement et le bien-être de l’enfant, de la naissance au début de l’âge adulte!